BATERA : vers une nouvelle institution

Près de 120 personnes ont décidé ce samedi de relancer la plateforme Batera fondée en 2002. Réunies à Espelette, elles ont annoncé une nouvelle phase de mobilisation citoyenne en faveur de la création d’une Collectivité Territoriale à statut particulier.

Rédaction Atalaia

5/10/2025

Près de 10 ans après la création de la Communauté d’Agglomération Pays Basque, la première institution qui regroupe les 158 communes du Pays Basque nord, ce samedi à Espelette 120 personnes ont réactivé la plateforme Batera, “ensemble” en basque. Ces représentants politiques et sociaux revendiquent une nouvelle institution pour les provinces du Labourd, de la Basse Navarre et de la Soule. Mais sous quelle forme?

Pour Battitta Boloki et Jean Claude Iriart, anciens responsables du Conseil des Élus et du Conseil de Développement, et membres de Batera, la nouvelle institution pourrait ressembler à la métropole de Lyon. “En s’appuyant sur ce qui existe déjà en France, la CAPB actuelle pourrait obtenir de nouvelles compétences qui sont actuellement aux mains du département des Pyrénées Atlantiques ou de la région Nouvelle Aquitaine. Cumuler les compétences de l’agglo et du département est loin d 'être négligeable” ont-ils assuré.

“Avec cette nouvelle institution ressemblant à celle de Lyon, le suffrage universel direct s'impose et le mille-feuille actuel se trouve simplifié. Cela amenerait aussi l’état à se réorganiser” ont ajouté Jean Claude Iriart et Battitta Boloki.

Dotée d’un budget de 3 milliards 900 000 euros, supérieur à celui de la région Nouvelle-Aquitaine, la métropole de Lyon regroupe 58 communes, 1 million 400 000 habitants et 9 400 agents.

Selon Jean Claude Iriart, le cas de la métropole de Lyon est plus une référence qu’un modèle. “Disposer d’une telle référence peut faciliter notre démarche. Cela avait été le cas en 2012 lorsque qu’il y avait eu une proposition concrète sur la table” a-t-il expliqué.

Tous sauf le RN

En plus du président centriste de la CAPB Jean René Etchegaray, les parlementaires de gauche Frédérique Espagnac, Colette Capdevielle, Iñaki Echaniz et Peio Dufau ont également participé à l’assemblée générale de Batera. L’ancienne députée socialiste Sylviane Alaux, les écologistes Sophie Bussière et Ana Ezcurra, le conseiller départemental Iker Elizalde étaient aussi dans la salle, aux côtés de nombreux militants de EH Bai et quelques représentants des démocrates basques EAJ-PNB, et des collectifs sociaux et culturels. Parmi les participants aussi: Paxkal Indo le président du Conseil de Développement, Josu Etxaburu le porte parole de la plateforme Gure Esku Dago, des membres de Alda, Bizi et des syndicats ELB et LAB, et Mercedes Graciet, la secrétaire générale de la CDFT en Iparralde.

Les réactions

“On peut parler de Lyon ou de la Corse mais il faut également regarder vers l’Alsace ou Paris. La loi NOTRE qui avait permis la création de l’agglo s’arrête au milieu du chemin. Le costume n'est pas adapé à nos ambitions.

Tout le monde souhaite le suffrage direct, moi aussi. Mais il y aura des conséquences dans les communes qui ne seront pas toujours toutes représentées. Il nous faudra une majorité à l’Assemblée Nationale et au Sénat. Il ne faut pas lacher. Prenons le temps d’en parler pour être à la mesure de l’ambition du Pays Basque” a expliqué Jean René Etchegaray.

“Le gouvernement de l’époque avait répondu à la demande du territoire et nous avions obtenu un accord politique. La création de l’agglo a été très importante pour le Pays Basque mais il ne s’agit pas de l’outil idéal. Il faut aborder la question du Béarn. Nos voisins n'ont pas entamé la même réflexion. Seront-ils d'accord?” a demandé de son côté la députée socialiste de Bayonne Colette Capdevielle.

Le député Peio Dufau a lui aussi remercié le travail de Batera. “En période de doutes et face à la montée de l’extrême droite, nous devons être plus proches des attentes des citoyens. En Corse, ils ont bien trouvé un consensus autour de cette question, nous devons donc faire beaucoup de pédagogie. À Paris les trois députés basques parlons d’une seule voix et cela interroge souvent. Nous avons une identité et si nous avons à nouveau un large consensus cela sera bien plus facile de l’expliquer à Paris” a souligné le parlementaire abertzale.

L'élue bayonnaise Martine Bisauta a rappelé que les démarches transpartisanes ont toujours payé. “Un pas a été fait, rien n’a jamais été donné, il faut aller le chercher et pour cela nous avons besoin d’une stratégie car toutes les communes ne seront plus représentées dans une Collectivité Territoriale à statut particulier souhaitée déjà il y a quelques années” a ajouté Martine Bisauta.

Pour le maire EH Bai de Hiriburu Alain Iriart “Batera doit poursuivre son action et la reprise est nécessaire. La mobilisation était issue du camp abertzale. Après des revendications comme l’indépendance, l’autonomie ou le département basque, Batera avait trouvé une place particulière pour que tous puissions travailler ensemble. Et ce n'est pas le préfet qui a permis la création de l'agglo mais bien la société civile et les élus locaux qui avaient poussé l'état français à poser la première étape. Nous avions accepté même si ce premier pas ne répond pas aux attentes du territoire. C’est un acquis et nous sommes dorénavant dans une situation dans laquelle la collectivité existe avec de gros avantages et des choses à corriger. Aujourd’hui nous ne sommes pas devant une feuille vierge, il faut être imaginatifs et inventifs” a lancé Alain Iriart.

Débat et euskara

Le droit à l’expérimentation et la promotion de l’euskara se sont également invités ce samedi lors de l’AG de Batera. Le militant euskaltzale Miguel Torre a réclamé une nouvelle institution qui puisse assurer un statut co-officiel de l’euskara et une discrimination positive permanente pour les bascophones qui sont actuellement minoritaires sur leur propre territoire.

L’ancien président de Seaska Peio Jorajuria souhaite une institution ayant plus de poids pour généraliser l’enseignement de l’euskara comme le prevoit la loi Molac. Il réclame aussi un Dasen propre au Pays Basque. Son objectif serait de répondre à plus de la moitié des familles qui choisissent un enseignement bilingue pour leurs enfants. “Nous sommes majoritaires et ne devons plus être traités comme une exception” a regretté Peio Jorajuria.

La feuille de route de Batera

Près de 10 ans après la création de l’agglo Pays Basque, Batera souhaite aller plus loin en pesant notamment lors des élections municipales de 2026. L’agglo sera alors aussi entièrement renouvelée. L’année suivante sera marquée par l’élection présidentielle et 2028 par les élections départementales et régionales. Aussi, personne ne sait si des élections législatives anticipées auront lieu dans l’hexagone.

Batera veut donc une mobilisation citoyenne large avec comme objectif d’obtenir une majorité sociale et politique. La plateforme a prévu d’organiser une campagne d’information et de soutien pour obtenir une Collectivité Territorial Spécifique et améliorer ainsi la vie quotidienne des 320 000 habitants du Pays Basque nord.